Tout don reçu est une responsabilité

L’équipe pastorale de nos paroisses  est avec vous ce temps « liturgiquement difficile» pour nous tous. Pour garder nos liens au moins une fois par semaine, veuillez trouver l’homélie  du P. Léonard comme chaque samedi.   

 

Bonne semaine  à vous toutes et tous….   Père Joseph

33e  dimanche du Temps ordinaire Année A

« Aussitôt, celui qui avait reçu les cinq talents s’en alla pour les faire valoir et en gagna cinq autres. De même, celui qui avait reçu deux talents en gagna deux autres. Mais celui qui n’en avait reçu qu’un alla creuser la terre et cacha l’argent de son maître. » (Mt 25, 16-18).

Frères et sœurs bien-aimés,

Quelle que soit sa petitesse ou sa grandeur, quelle que soit sa quantité ou sa qualité, tout don reçu est une responsabilité et un appel à le faire valoir par notre engagement participatif. Un sacrement reçu de l’Eglise, un héritage reçu de nos parents, de la nature ou de Dieu,  n’est pas ce qui fait notre mérite, c’est notre manière personnelle de le gérer, de l’entretenir, de l’utiliser, de le déployer jusqu’à le développer pour en faire un bien plus grand et meilleur.

Car ce n’est pas ce que nous avons reçu qui est déterminant, ce n’est pas la portion de nos dons reçus qui fait notre valeur ou notre mérite propre, ce qui fait notre mérite, c’est notre bonne volonté et notre capacité à faire fructifier ce que nous avons reçu.  Comme on ne saurait condamner ni reprocher à l’auriculaire d’être le plus petit des doigts, de même on ne saurait faire aveuglément l’éloge du plus grand parmi les doigts qui est le majeur, car chaque doigt, qu’il soit le plus petit ou le plus grand, est là pour jouer un rôle spécifique, une mission, et tous les doigts, qui ne sont pas identiques ni égaux en taille, ensemble se complètent harmonieusement pour constituer notre organe humain qu’on appelle la main.

L’essentiel alors, c’est que chaque doigt joue un rôle, son rôle ; ce qui compte le plus, ce n’est pas de croiser les bras de notre corps, encore moins les bras de notre foi, de notre esprit et de notre intelligence et d’être seulement là à chanter alléluia ou à se plaindre, l’essentiel, c’est d’oser et de bouger, c’est de se battre sans cesse, c’est de savoir se mouvoir, d’agir dans le sens du bien et du meilleur, dans la limite de la normalité, bien sûr,  bref, c’est de savoir être entreprenant.

Et c’est là que se situent le mérite et la valeur de chacun. Qui sait bouger et se déployer  vivra ; par contre, qui n’avance pas et demeure immobile sur place recule et petit à petit devient inerte et meurt. Car, ici-bas, que ce soit sur le plan simplement humain ou sur le plan spirituel, nous marchons comme sur des sables mouvants où s’arrêter, c’est s’enfoncer et périr. Un enfant qui ne devient pas adulte, qui ne sait pas se battre et qui est toujours pareil est un cas à déplorer, un sérieux cas à plaindre ; on est tous homme virtuellement en naissant, mais on le devient vraiment en se battant, en s’adaptant aux vicissitudes de la vie ; et je pense que c’est en se battant qu’on devient plus homme ; on naît chrétien par le baptême, mais on le devient petit à petit en adoptant les attitudes de Jésus notre maître, en menant une vie imprégnée de foi, d’amour et d’espérance.

Frères et sœurs, tout cet arsenal de principes, si je pouvais l’appeler ainsi, est suivi, d’une part, par la femme active et précieuse de la première lecture, et  d’autre part, par les deux premiers serviteurs à qui on a remis des talents, c’est-à-dire des monnaies d’argent à faire fructifier.

Dans la parabole de l’évangile, en effet, les trois serviteurs avaient un maître qui partit en voyage après avoir remis cinq talents à l’un, deux talents à un autre, au troisième un seul, à chacun selon ses capacités. Aussitôt, après le départ du maître, le serviteur qui avait reçu cinq talents ne perdit pas le temps ; il s’en alla pour les faire valoir, et heureusement, il en gagna cinq autres. Puis celui qui avait reçu deux talents alla faire de même et en gagna deux autres. Mais, le troisième qui avait reçu un seul talent, au lieu d’aller faire fructifier le talent reçu, alla enfouir l’argent de son maître dans la terre, de peur de faire faillite sans doute, afin de rendre intact l’unique talent à son maître qu’il qualifiera plus tard d’homme dur et exigent.

Je loue les deux premiers serviteurs qui, avec enthousiasme, ont su faire preuve de dynamisme en allant faire valoir les talents reçus ; j’admire en particulier celui qui en avait reçu deux et qui ne s’était pas dit : « Pourquoi l’autre a reçu cinq talents, alors que ce n’est que deux que le maître m’a donnés ? » Il a été, sans se poser de question, faire fructifier ses deux talents.

Par contre, le dernier serviteur qui avait reçu un seul talent, mécontent à l’égard du maître, et jaloux  sans doute de ses compagnons, se fit du mauvais sang, et, ne voulant pas prendre de risque, il alla cacher l’argent, puis il alla se croiser les bras, sans rien faire, attendant passivement et oisivement le retour du maître. Evidemment celui-ci ne passa pas par quatre chemins avant de lui cracher la vérité : « Serviteur mauvais et paresseux… Enlevez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui en a dix… »

Car, frères et sœurs,  quand on ne fait rien de sa vie et de sa personne, on perd petit à petit sa dignité et sa personnalité ; quand on ne fait rien du  sacrement qu’on a reçu, la grâce reçue s’étiole et finit par être sans efficacité. Or quand on sait en vivre, le bien ou la grâce reçue se développe, se diffuse et porte partout beaucoup de fruit.

Et maintenant, ma sœur, mon frère, à quel personnage t’identifies-tu ? A la femme active et travailleuse de la première lecture ? A l’un de deux serviteurs qui ont su se déployer et ont fait valoir leur don reçu ? Ou bien au troisième serviteur « mauvais et paresseux » ? Si c’est peut-être à ce dernier que tu ressembles, ce n’est pas grave, tu peux encore rattraper dans une autre gare le train de la conversion, relève-toi et recommence la vie avec Jésus qui te tend encore la main. Bon courage et bon dimanche.

Père Léonard AGOSSOU