Petit Roc carême 2020

Les 3 Paroisses de la vallée
St J. M. Vianney, St Marc Jaumegarde, St Etienne de Vauvenargues.
94, avenue Fontenaille
Accueil : samedi de 10h à 12h
les3paroissesdelavallee@gmail.com

3 Paroisses de la vallée


Père Desplanches : 04 42 23 13 46

N° 686 CAREME 2020

Vais-je réussir mon Carême ?

Le carême est un temps d’effort, où l’on essaie de remettre les choses à leur place et de se recentrer sur l’essentiel. Faut-il prendre de bonnes résolutions ? Oui, à condition de ne pas faire de ces résolutions le moyen de mériter Dieu.

On ne mérite jamais Dieu, comme Jésus le rappelle aux pharisiens. Si le carême est l’occasion pour nous de devenir des pharisiens, on l’aura pour le coup totalement raté. Une anecdote sur les pères du désert, ces premiers moines du désert égyptien, est éclairante ; un novice va trouver un vieux moine et lui dit : « Abba, père, je perds mes journées, je ne sers à rien. » Le vieux moine lui répond : « Même quand je perds mes journées, je rends grâce. ». Même quand on a l’impression de perdre ses journées, de piétiner, de ne pas grandir dans la vie spirituelle, remettre cette difficulté à Dieu et la vivre avec lui, c’est déjà renverser la difficulté, c’est l’utiliser pour revenir à Dieu, comme, pour une prise de judo, vous utilisez la force de votre adversaire dirigée contre vous. Le drame des moments difficiles, c’est quand on se dit que l’on n’est pas digne de Dieu, que l’on n’est pas à la hauteur. Alors on s’éloigne de lui, on se dit : « Je reviendrai quand j’aurai fait mes exercices, quand je présenterai bien et qu’il pourra m’aimer. »

L’ascèse à laquelle on est convié pendant le carême c’est l’effort qu’il faut fournir pour se concentrer sur ce qui nous rend vraiment heureux, sur la joie véritable, sans se laisser distraire par tout ce qui brille autour. L’ascèse véritable est donc quelque chose d’assez joyeux, parce qu’on se recentre sur ce qui nous fait vivre, sur nos désirs les plus profonds en laissant de côté les désirs annexes ou les fantaisies qui nous traversent l’esprit.

Et savoir quels sont nos désirs les plus profonds, cela demande un peu de temps, d’attention à soi, à qui on est. On cite souvent le début d’une phrase de Bernanos dans le Journal d’un curé de campagne qui dit : « La grâce, c’est de s’oublier ». Mais on occulte la suite qui dit : « Mais si tout orgueil en nous était éteint, la grâce des grâces serait de s’aimer soi-même comme n’importe lequel des membres souffrants de Jésus-Christ ». Ce n’est pas en ne faisant pas attention à qui nous sommes que nous allons trouver Dieu. Nous avons à rencontrer Dieu dans notre chair, dans notre vie telle qu’elle est, non telle que nous aimerions qu’elle soit. Nous avons à habiter cette vie-là, ce qui demande un peu d’attention à soi, pour se connaître.

Quand vous priez, de quoi parlez-vous à Dieu ? Beaucoup de gens me disent que quand ils prient, il ne se passe rien. Mais bien souvent, les gens ne sont pas là quand ils prient. Ils voient à leur place un petit saint de plâtre un peu sulpicien, sans défaut, sans désirs inavouables, sans colère, sans jalousie… Comment voulez-vous avancer avec Dieu si vous n’êtes pas là ? Il arrive que nos soucis, nos difficultés, notre colère et même notre colère contre Dieu soient notre manière d’être là. Si on les présente à Dieu, on peut commencer à avancer. Suis-je capable de présenter à Dieu ce qui ne va pas et qui selon moi pourrait lui déplaire ? Nous ne sommes pas là pour plaire à Dieu, mais pour être nous-mêmes. Prier, c’est être soi-même avec Dieu, c’est faire aussi un acte de confiance. C’est savoir que Dieu m’aime infiniment comme je suis, ce qui ne veut pas dire qu’il ne veut pas m’aider à progresser pour devenir encore plus moi-même. Mais son amour est inconditionnel, il n’attend pas que je sois le premier de la classe et bien gentil pour m’aimer. Dieu nous a faits pour l’infini, mais cet infini prend naissance précisément dans nos limites, quand nous acceptons de n’être que nous-mêmes, et non Thérèse d’Avila ou  Jean Marie Vianney, quand nous acceptons que notre vie ait des limites. C’est alors qu’on peut s’ouvrir à l’infini véritable, c’est-à-dire à la présence de Dieu dans notre vie.

C’est en étant vraiment soi-même, en occupant cette terre promise qu’est notre chair, dans laquelle Dieu nous attend, que l’on peut réussir son carême.

 

Adrien Candiard, dominicain à l’Institut Dominicain des Etudes 0rientales du Caire

Approfondir votre lecture